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Le Monde de NEOMA

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Comment gérer l’improbable dans une situation instable et chaotique ? Comment improviser ? Comment tenir compte des contraintes tout à la fois complémentaires et contradictoires ? Par exemple, comment préserver la santé des populations et l’économie dans le cas d’une épidémie qui n’a de cesse de muter ?  

Observant la manière dont les Etats ont fait face à la crise de la Covid-19, deux professeurs, Patrick Lê de NEOMA Business School et Camille Pradies de l’EDHEC, ont rédigé l’article « Sailing through the storm: Improvising paradox navigation during a pandemic ». Ils ont dégagé quelques grandes leçons.

 

Quand l’improbable survient, quand la situation devient instable, les décideurs rencontrent trois grandes difficultés.

1/ Le brouillard d’incertitude

Le brouillard d’incertitude, ce sont par exemple les mouvements de l’ennemi qu’il est impossible de prédire, les conditions météo inconnues au-delà de dix jours, la mutation d’un virus…  « Pire, c’est quand on ne se rend pas compte que l’on est dans le brouillard : on ne sait pas que l’armée ennemie se déplace, que le virus se propage…, souligne le professeur Patrick Lê. C’est l’angle mort ».

2/ Le turning point

Conséquence du brouillard : le turning point. C’est le coup de volant donné brutalement quand on aperçoit l’obstacle au dernier moment. C’est un changement de cap rapide. Durant la crise de la Covid-19, les gouvernements ont dû opérer quelques virages un peu abrupts. Quand ils annonçaient l’ouverture des théâtre le lundi, et leur fermeture le jeudi.

3/ L’apprentissage chaotique

L’apprentissage sur le tas est forcément plus lent et plus chaotique. « Dans le cas de la crise de la Covid-19, il n’était pas possible d’apprendre de l’expérience des autres pays tant les situations sociales, économiques et culturelles sont différentes », remarque Patrick Lê.  Impossible d’appliquer les mesures chinoises en France. « En Europe, tous les pays improvisaient en même temps, on ne pouvait pas tirer des leçons des voisins, indique le professeur de NEOMA Business School. Et on a répété les mêmes erreurs, jusqu’à devenir plus prudents, plus humbles. On a mis en place les semi-confinements, et les oscillations entre des stratégies opposées (comme tout confiner ou au contraire tout déconfiner) ont été plus faibles ».

 

 

Pour faire face à ces difficultés, les deux chercheurs, Patrick Lê et Camille Pradies, ont dégagé quelques grandes règles pour appréhender ces crises extrêmes.

1/Une équipe pluridisciplinaire pour détecter les signaux faibles.

Les signaux faibles sont par définition des petites manifestations qui paraissent anodines et lointaines, pourtant ils annoncent un événement important. Ils peuvent venir de toute part : santé, social, économique, technologique, géopolitique, climatique…. Seule une équipe composée d’expertises diverses est capable de percevoir toutes les alertes aussi minimes soient-elles. « Dans un monde globalisé, les choses peuvent aller assez vite, reprend le professeur Patrick Lê. La faillite de la Silicon Valley Bank en mars 2023 par exemple pouvait avoir des répercussions en Europe ».

2/ Développer le paradoxe mindset

« Le paradoxe mindset, c’est comprendre que des choses en apparence contradictoires peuvent être réconciliées. C’est se dire que l’on peut ménager la chèvre et le chou, explique le professeur de NEOMA BS. Cela demande aux décideurs de la créativité et de l’adaptabilité à des cas spécifiques.  

Il est nécessaire de prévoir les crises et d’avoir des plans. On a des plans en cas de guerre, en cas d’accident nucléaire, en cas de pandémie…. Mais il va falloir les adapter à la situation qui sera unique. Dans un contexte qui évolue très rapidement, il faut une grande capacité d’improvisation. Les phases de planification et d’action sont simultanées.

De tels résultats s’appliquent à des événements aussi improbables que graves mais aussi à des crises plus ordinaires. « Leur champ d’application est vaste, écrivent les deux chercheurs. La vie contemporaine est marquée par l’instabilité, les crises et les bouleversements ». 

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